Wicked, première partie : une ode à l’outsider, portée par une magie queer !

Dans un univers où le ciel se teinte de vert et où les sorcières ne sont jamais ce qu’elles semblent être, Wicked, première partie, réalisé par Jon M. Chu, offre bien plus qu’une simple adaptation du célèbre musical de Broadway. C’est une plongée spectaculaire dans l’univers d’Oz, revisitée avec un regard neuf et inclusif, où chaque note, chaque interaction et chaque choix narratif résonne profondément avec les thèmes d’identité, d’exclusion et d’acceptation de soi — des thématiques qui touchent particulièrement la communauté LGBTQ.

Une sorcière pas comme les autres

Au cœur de l’histoire, Elphaba, la future Wicked Witch of the West, incarne parfaitement cette figure de l’outsider. Rejetée pour sa différence — sa peau verte, métaphore puissante de la marginalisation —, elle devient le symbole d’une quête d’acceptation. Ce personnage, merveilleusement interprété par Cynthia Erivo, rappelle à chaque instant les luttes auxquelles sont confrontées tant de personnes LGBTQ dans leur cheminement personnel.

Le film explore avec délicatesse son amitié tumultueuse avec Glinda (Ariana Grande), une jeune femme lumineuse et populaire, mais enfermée dans les attentes que la société place sur elle. Cette relation complexe, oscillant entre rivalité et profonde affection, peut être lue comme une métaphore des dynamiques queer : la tension entre l’envie d’être accepté dans le mainstream et le désir de rester fidèle à soi-même.

Ariana Grande, une Glinda scintillante et nuancée

Ariana Grande surprend dans ce rôle qui, à première vue, semblait taillé pour une interprétation légère et superficielle. Pourtant, sa performance révèle une Glinda bien plus nuancée qu’attendue. Grande réussit à capturer la dualité de son personnage : une façade parfaite et enjouée qui cache des doutes et une quête d’identité. Dans une scène poignante, son interprétation de “Popular” prend une teinte douce-amère, laissant entrevoir une profondeur émotionnelle inattendue.

Pour les spectateurs LGBTQ, la transformation de Glinda peut résonner comme une allégorie des masques que beaucoup portent dans des environnements où l’authenticité n’est pas toujours acceptée. Grande, elle-même une icône gay, injecte une touche de vulnérabilité et de glamour qui parle directement à son public queer.

Jonathan Bailey, un Fiyero magnétique et subtilement queer

Jonathan Bailey, qui incarne le charismatique Fiyero, apporte une énergie magnétique à son personnage, insufflant une dose bienvenue de modernité à ce rôle classique. Ouvertement gay dans la vraie vie, Bailey transcende les conventions du héros romantique traditionnel en explorant les nuances de Fiyero avec une subtilité remarquable. Une scène clé, où Fiyero chante et danse avec une aisance désarmante, offre des moments qui flirtent doucement avec une potentielle bisexualité — un clin d’œil discret mais éloquent qui ne passera pas inaperçu auprès du public queer.

Bailey maîtrise l’art de faire passer des émotions complexes à travers de petits gestes et regards, ajoutant une profondeur inattendue à un personnage qui aurait pu rester en surface. Sa chimie à la fois avec Elphaba et Glinda nourrit cette ambiguïté sous-jacente, enrichissant les dynamiques du trio principal. En incarnant Fiyero, Bailey réaffirme que les rôles masculins romantiques peuvent être interprétés avec une fluidité et une modernité qui résonnent avec l’époque.

Une esthétique queer, une magie visuelle

D’un point de vue esthétique, Wicked, première partie est une célébration flamboyante de la différence et de la magie. Les costumes signés Paul Tazewell revisitent les codes classiques d’Oz avec une touche résolument queer : des robes exubérantes, des couleurs vives, des textures et des motifs qui célèbrent l’excentricité. Chaque plan semble conçu pour capturer un moment digne d’un bal queer ou d’une parade Pride.

La mise en scène de Jon M. Chu, connue pour sa maîtrise des chorégraphies (comme dans Crazy Rich Asians et In the Heights), brille ici avec des numéros musicaux qui dégagent une énergie euphorisante. “Defying Gravity”, le morceau emblématique du musical, est magnifiquement réinterprété, devenant un hymne à la libération personnelle. La scène, où Elphaba s’élève littéralement au-dessus des normes et des attentes, est un moment de catharsis queer puissant.

Une lecture LGBTQ des thématiques de Wicked

Au-delà de l’esthétique, Wicked explore des thèmes qui résonnent profondément avec la communauté LGBTQ. La quête d’Elphaba pour trouver sa place dans un monde qui la stigmatise est une métaphore universelle pour ceux qui se sentent différents. Sa relation avec Glinda, souvent interprétée par les fans comme ayant des sous-entendus romantiques, ouvre la porte à une lecture queer qui enrichit encore davantage le récit.

Le film prend soin de ne jamais donner de réponses simples ou binaires. Les méchants ne sont pas toujours ceux que l’on croit, les héros portent leurs contradictions, et la notion de “bien” et de “mal” est constamment remise en question. Cette fluidité morale reflète une vision plus inclusive du monde, où les identités ne sont pas figées, mais évolutives.

Une bande originale à la hauteur des attentes

La musique, pilier central de Wicked, est sublimée par les performances vocales de Cynthia Erivo et Ariana Grande. Leurs duos, comme “What Is This Feeling?” et “For Good”, transcendent le simple échange vocal pour devenir de véritables dialogues émotionnels. Erivo apporte une intensité brute à ses solos, tandis que Grande étonne par sa capacité à moduler sa voix pour s’adapter aux nuances de Glinda.

Pour le public queer, ces morceaux deviennent des hymnes personnels. Qui n’a jamais ressenti l’envie de “défier la gravité” des normes sociales ? Qui n’a jamais été touché par une amitié qui change profondément la vie, comme celle d’Elphaba et Glinda ?

Une équipe inclusive, un message universel

Le film brille également par son équipe diversifiée, devant et derrière la caméra. La présence d’acteurs et de créateurs issus de différentes origines et identités ajoute une authenticité et une richesse au projet. Cette inclusion reflète non seulement l’esprit de l’histoire, mais aussi l’évolution nécessaire d’Hollywood vers une représentation plus fidèle de la réalité.

Wicked, première partie n’est pas seulement une adaptation réussie d’un musical culte. C’est une déclaration d’amour à la différence, à la puissance de l’amitié et à la magie de trouver sa voix. Pour les spectateurs LGBTQ, le film offre un miroir dans lequel se reflètent leurs luttes, leurs triomphes et leurs aspirations.

Dans un monde où il est encore trop facile de cataloguer et de rejeter ce qui sort des normes, Wicked nous rappelle que ce sont justement ces différences qui rendent la vie riche et extraordinaire. Alors que la deuxième partie s’annonce déjà comme un événement incontournable, cette première moitié nous laisse avec une certitude : la magie ne fait que commencer.

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