Pendant des décennies, McDonald’s n’a pas seulement nourri des millions de personnes à travers le monde. L’enseigne a également bâti un univers coloré et fantasque autour de personnages emblématiques : Ronald McDonald, Grimace, le Hamburglar, Birdie, les Fry Kids, le Capitaine Crook et bien d’autres. Ces figures étaient plus que de simples mascottes ; elles formaient un véritable univers étendu à mi-chemin entre le marketing enfantin et la culture pop.
Personnellement, j’ai grandi avec ces personnages, qui ont eu leur apogée à travers les jouets des Happy Meals (et j’en ai des dizaines, voir une bonne centaine), mais aussi le jeu vidéo (oui, oui, on va en parler), et je vais revenir avec vous sur leur histoire, jusqu’à leur disparition de nos écrans et nos restaurants.

La naissance de Ronald McDonald : le clown le plus célèbre du fast-food
L’histoire débute en 1963, lorsque McDonald’s décide de surfer sur la popularité croissante des clowns auprès des enfants (c’est assez drôle quand on sait qu’à partie des années 90, les clowns deviennent effrayants et font peur à tous les enfants). Après le succès de Bozo the Clown à la télévision américaine, la marque crée Ronald McDonald, un personnage clownesque censé incarner l’amusement et attirer les familles dans les restaurants. Le premier Ronald fut interprété par nul autre que Willard Scott, qui jouait déjà Bozo sur une chaîne locale.
Le design du personnage à l’époque était rudimentaire : un plateau à hamburgers sur la tête, un nez en gobelet et un costume aux couleurs criardes. Rapidement, l’image a été retravaillée pour en faire le Ronald que l’on connaît : un clown bienveillant, au maquillage blanc, cheveux rouges, salopette jaune et chaussures surdimensionnées.
Ronald McDonald devient alors le visage de McDonald’s à l’échelle mondiale, incarnant les valeurs de fun, de rapidité et de convivialité. À partir des années 1970, il est accompagné d’une bande de compagnons tout droit sortis de l’imagination débordante de la firme.

McDonaldland : un monde parallèle aux frites et à la fantaisie
Dans les années 70, McDonald’s va encore plus loin avec la création d’un univers entier, McDonaldland, imaginé avec l’aide de l’agence de publicité Needham, Harper & Steers. S’inspirant des shows pour enfants, McDonaldland prend la forme d’un royaume farfelu habité par des créatures loufoques.
Chaque personnage représente un élément du menu ou de l’expérience McDonald’s :
- Grimace (1971) : à l’origine un méchant à quatre bras appelé “Evil Grimace”, il volait les milkshakes. Il devient rapidement un gentil benêt violet, maladroit et attachant.
- Hamburglar (1971) : petit brigand à rayures noires et masque, il vole les hamburgers. Il incarne la malice enfantine et l’irrévérence.
- Birdie the Early Bird (1980) : la première mascotte féminine, introduite pour promouvoir les menus du petit déjeuner. Elle symbolise l’optimisme matinal.
- Mayor McCheese, Officer Big Mac, Fry Guys/Fry Kids, Captain Crook, et bien d’autres enrichissent encore ce monde surréaliste.
Les personnages apparaissent dans des publicités télévisées, des spots éducatifs et même dans des livres d’histoires. Un effort marketing titanesque qui, pendant plus de deux décennies, va séduire les enfants du monde entier (et j’en ai fait partie, comme dit au début de l’article).

Les Happy Meals et la conquête des cœurs (et des estomacs)
L’arrivée du Happy Meal en 1979 marque un tournant. McDonald’s a compris qu’un simple menu enfant pouvait devenir un puissant levier de fidélisation s’il était accompagné de jouets. Et quoi de mieux que les personnages de McDonaldland pour captiver les plus jeunes ?
Les premières séries de jouets à l’effigie de Ronald et ses amis sont un succès fulgurant. Grimace en figurine articulée, Hamburglar à friction, Birdie en peluche… Chaque mois apporte une nouvelle série. Ces objets deviennent des trésors de collection, mais aussi des ambassadeurs de la marque.
Dans les années 90/90, McDonald’s s’associe également à des licences externes (principalement Disney, ou chaque nouveau film sera décline en jouet, puis Pokémon, etc.), mais les mascottes internes restent les favorites pendant longtemps. Les enfants ne venaient pas seulement pour les nuggets : ils venaient vivre une aventure dans McDonaldland.

McDonald’s et le jeu vidéo : quand le Big Mac devient pixelisé
Peu de gens s’en souviennent, mais les personnages de McDonald’s ont aussi été les héros de plusieurs jeux vidéo, souvent de qualité étonnamment bonne pour des produits promotionnels.
Le plus célèbre reste “McDonald’s Treasure Land Adventure” (1993) sur Sega Mega Drive. Développé par Treasure, le jeu est un jeu d’aventure où Ronald doit récupérer des morceaux de carte au trésor dans un univers ultra coloré. Graphismes chatoyants, gameplay fluide, level design soigné : le jeu n’a rien d’un simple coup marketing bâclé. Il est aujourd’hui encore apprécié par les rétrogamers.
Mais dans ma famille, le jeu que l’on avait et sur lequel j’ai pu jouer des centaines d’heures, c’est M.C. Kids ou McDonald’s Trasure and Adventure aux USA sur NES en 1992. Un jeu de plateforme dans la veine de Super Mario Bros. 3, avec deux enfants explorant McDonaldland. Ce jeu reste encore aujourd’hui l’un de mes préférés sur ma toute première console de jeu.
Il met en scène deux enfants – Mick et Mack – qui doivent aider Ronald McDonald à retrouver son sac magique, dérobé par le terrible Hamburglar. S’il est comparé à Super Mario Bros, pour moi, il avait son propre style et était assez différent. Il fallait ramasser et lancer des blocs, sauter sur des plateformes mouvantes et surtout, on pouvait changer la gravité dans certaines zones et se retrouver la tête à l’envers.
Plusieurs lieux nous font voyager dans le McDonaldland avec la Forêt de Ronald, la Caverne de Grimace, le Royaume de Birdie… Et j’adorais la musique autour du jeu.

Une lente disparition : où sont passés Ronald et ses amis ?
À partir des années 2000, quelque chose change. Les personnages de McDonaldland, autrefois omniprésents, disparaissent peu à peu des campagnes publicitaires, des emballages, des restaurants. Pourquoi ?
Voici les raisons que j’ai pu trouver :
- Les nouvelles priorités marketing : McDonald’s veut désormais séduire les millennials et les adultes. Les mascottes enfantines sont perçues comme ringardes, voire contre-productives dans une époque où la malbouffe est scrutée.
- Les critiques sur l’obésité infantile : aux États-Unis notamment, McDonald’s fait face à de nombreuses attaques. Utiliser des clowns et des jouets pour vendre du fast-food aux enfants devient polémique. En 2011, San Francisco interdit même la distribution de jouets dans les menus ne respectant pas certains critères nutritionnels.
- La peur des clowns : cela peut sembler anecdotique, mais après la sortie du film Ça en 2017 et la recrudescence des “clowns maléfiques” dans la pop culture, Ronald McDonald devient une figure inquiétante pour certains. McDonald’s réduit alors fortement ses apparitions publiques.
En France, la situation a été encore plus radicale. Ronald McDonald, déjà moins populaire qu’aux États-Unis, a complètement disparu des spots télévisés. L’univers McDonaldland n’a jamais eu le même écho ici : les personnages sont restés connus des initiés, mais n’ont jamais atteint le statut d’icônes culturelles comme aux USA. Et la France est à ma connaissance le seul pays ou les jouets en plastiques sont remplacés par des jouets en cartons et des cartes, dans une dynamique de Green Washing.

Une nostalgie persistante
Malgré leur disparition, Ronald et ses amis continuent de susciter la nostalgie. De nombreux fans collectionnent les jouets vintage, rejouent aux jeux vidéo ou restaurent les statues grandeur nature des restaurants des années 80.
Sur YouTube et TikTok, des vidéos d’archives, des analyses culturelles et des créations de fans témoignent d’un regain d’intérêt. Certains rêvent même d’un retour façon “cinematic universe”, à la manière de Marvel.
McDonald’s, de son côté, a tenté quelques résurrections. En 2015, une version modernisée de Hamburglar a fait une brève apparition sous forme d’un hipster séduisant… mais le public n’a pas suivi. En 2023, la marque a évoqué à nouveau Grimace dans des campagnes autour du “Grimace Shake”, devenues virales sur TikTok, preuve que l’attachement est encore bien là.
En France, récemment, on a pu retrouver Birdie, Grimace et Hamburglar dans des “jouets pour adultes”, lors d’une collaboration avec Minecraft. Preuve du succès, au bout d’une semaine, il était difficile d’avoir le droit à un jouet dans vos restaurants. En début d’année, ces mêmes personnages s’illustraient dans des cadeaux que l’on pouvait avoir grâce à nos points collectés, notamment des écussons. Est-ce la le début d’un grand retour pour toutes ces mascottes ? L’avenir nous le dira…